mercredi 4 février 2009

Le temps est-il venu pour une solution à trois Etats ?


par Caroline B. Glick
JewishWorldReview.com
Traduction : Marc Brzustowski

L’opération “Plomb Durci” a fourni à beaucoup l’opportunité de réaffirmer la valeur sacrosainte de la « solution à deux Etats ». Un nombre croissant d’observateurs a pointé le fait que le régime djihadiste du Hamas, sponsorisé par l’Iran à Gaza, apporte la preuve qu’Israël n’a pas d’autre choix pour sécuriser le territoire transféré naguère au Fatah-OLP, sinon qu’il retourne sous le contrôle du même Fatah-OLP.

Cette réaffirmation a également provoqué une polémique au sujet des échecs propres au Fatah-OLP depuis qu’il a formé l’Autorité Palestinienne en 1994.

Malgré les milliards de dollars qu’il a reçu d’Israël et de l’Occident, malgré ses forces armées et entraînées par l’Occident s’élevant à plus de 75 000 hommes et le crédit sans limite du soutien politique international dont il jouit, le régime créé par le Fatah-OLP n’a pas construit d’Etat, mais plutôt une voyoucratie cleptomane, dans laquelle les règles de droit ont été remplacées par les comportements totalitaires.

Au lieu d’éduquer son peuple à désirer la paix, la liberté et la démocratie, l’OLP-Fatah dirigé par l’AP l’a endoctriné à propager le djihad contre Israël dans une guerre sans fin.

Ces constats ont conduit trois penseurs de premier plan du courant conservateur – l’ancien ambassadeur américain à l’ONU, John Bolton, le Président du Forum pour le Moyen-Orient, Daniel Pipes et Efraïm Inbar, directeur du Centre d’Etudes Stratégiques Begin-Sadate de l’Université Bar-Ilan (BSBI)- à publier, tous autant qu’ils sont, des articles concernant le rejet de la solution à deux Etats des mois précédents.

Bolton, Pipes et Inbar ne sont pas seulement d’accord sur le fait que le paradigme à deux Etats a, bel et bien, échoué, ils tombent aussi d’accord sur ce qu’il faut faire désormais pour « résoudre » le conflit palestinien. Selon leur vision, la « solution à deux Etats » déchue devrait être remplacée, selon les termes de Bolton, par « la solution à trois Etats ». Tous trois débutent leur analyse par l’assertion selon laquelle Israël n’est pas intéressée à contrôler Gaza ni la Judée-Samarie. Depuis que les Palestiniens ont démontré qu’on ne pouvait avoir confiance en leur souveraineté, les trois auteurs arguent que la meilleure chose à faire est de retourner à la situation qui prévalait entre 1949 et 1967 : l’Egypte devrait reprendre le contrôle de Gaza et la Jordanie devrait reprendre celui de la Judée et de la Samarie.

Bolton, Pipes et Inbar savent pertinemment que l’Egypte et la Jordanie ont tous les deux rejeté cette idée, mais ils arguent qu’on devrait faire pression sur elles pour qu’elles reconsidèrent la question. Ils expliquent que l’Egypte redoute que le Hamas –une organisation sœur de ses propres frères musulmans – ne parvienne à la déstabiliser. La Jordanie, pour sa part, a deux bonnes raisons de refuser un tel projet. Le Royaume hachémite est le régime d’une minorité. Une large majorité de Jordaniens sont ethniquement des Palestiniens. Ajouter 1,2 million supplémentaire provenant de Judée et Samarie pourrait déstabiliser le Royaume. Si bien que l’un comme l’autre, OLP et Hamas, représentent eux-mêmes une menace pour le Régime. Les Hachémites se souviennent encore de quelle façon, avec le soutien syrien, l’OLP tenta de les renverser en 1970.

Il en va de même concernant le Hamas : sa popularité n’a cessé de grandir au fur et à mesure de son renforcement à Gaza et en Judée-Samarie. En intégrant les territoires de l’Ouest et de l’Est du Jourdain, les chances que le Hamas défie le régime s’accroissent considérablement. Si on y ajoute le mixte de subversion et de soutien financier syrien, ainsi que la pénétration de la Jordanie par Al Qaeda depuis l’Irak – particulièrement dans l’éventualité d’un retrait américain- le danger imminent que les populations des territoires de l’Ouest et de l’Est se manifestent contre le régime hachémite devient probant.

On fait souvent la remarque que la popularité du Hamas parmi les Palestiniens est proportionnelle au niveau de corruption de l’AP contrôlée par l’OLP-Fatah. On note aussi que du fait de l’endoctrinement djihadiste inculqué à la société palestinienne par l’AP contrôlée par le Fatah, le transfert de loyauté politique de la population, de l’OLP-Fatah vers le Hamas fait, sur le plan idéologique, peu de différence.

En revanche, ce qu’on a peu voulu mettre en évidence, c’est la signification stratégique de la nature des relations entre le Hamas et l’OLP-Fatah, depuis l’instauration de l’Autorité Palestinienne en 1994, jusqu’à ce que le Hamas ne l’expulse de Gaza en 2007. Dès que l’AP s’établit en 1994, le premier ministre d’alors, Yitzhak Rabin, soutient que l’OLP-Fatah partage l’intérêt d’Israël à combattre le Hamas, parce que le Hamas constitue une menace pour son autorité.

Ce que Rabin n’est pas parvenu à reconnaître, c’est la nature de la menace que représentait le Hamas pour l’OLP-Fatah, qui était et demeure qualitativement différente de la menace qu’il pose à Israël. L’OLP-Fatah n’a jamais eu de problème avec les attaques du Hamas contre Israël, ni avec son idéologie d’anéantissement, tant qu’elles concernent Israël. Cette idéologie est partagée par l’OLP-Fatah et est très largement populaire parmi les Palestiniens. Par conséquent, non seulement l’OLP-Fatah n’a jamais empêché le Hamas d’attaquer Israël, mais il a collaboré avec le Hamas pour qu’il attaque Israël et elle l’a fait tout en disséminant l’idéologie génocidaire du Hamas par le truchement de l’Autorité Palestinienne. L’OLP-Fatah ne s’en est prise effectivement au Hamas que lorsqu’elle a commencé à sentir que le Hamas risquait de poser ses griffes sur les leviers du pouvoir, mais sous tous les autres points, elle supporte le Hamas et continue de le faire.

Malheureusement, la même situation prévaut aussi bien en Egypte qu’en Jordanie. La Haine des Juifs, similaire au modèle nazi, propagée par le Hamas est partagée par la vaste majorité des Jordaniens et Egyptiens. Les appels islamistes à l’extermination du peuple juif et à la destruction d’Israël est le thème dominant les mosquées, les séminaires, les universités et les parutions médiatiques dans les deux pays. L’opposition populaire aux traités de paix que l’Egypte et la Jordanie ont signé avec Israël demeure virulente pour plus de 90% dans les deux pays.

En dépit des demandes israéliennes répétées de le voir agir, l’OLP-Fatah n’a jamais mis fin à son incitation à l’antisémitisme djihadiste. L’OLP-Fatah n’a jamais cru – ainsi que l’aurait souhaité Israël – que sa meilleure chance de se maintenir au pouvoir était d’inculquer au Palestiniens de rejeter la haine, de désirer la liberté, la démocratie et les bénédictions que la paix pouvait leur offrir. De même, jamais les Hachémites en Jordanie ni le régime du Président Hosni Moubarak en Egypte n’ont cru que la voie royale pour stabiliser ou renforcer leurs propres régimes consiste à prôner l’ouverture et la paix et de rejeter l’antisémitisme djihadiste. Tout au contraire, durant les dernières années, l’Egypte est devenue le centre de l’antisémitisme djihadiste dans le monde arabe et la Jordanie détient l’un des plus hauts taux de haine des Juifs au monde.

La situation sur le terrain en Jordanie, Egypte, Gaza et en Judée-Samarie clarifie deux choses. Primo, une reprise du contrôle jordanien sur la Judée-Samarie et d’un contrôle égyptien sur Gaza augmenterait très probablement les chances que les régimes modérés dans les deux pays s’affaiblissent, voire s’effondrent. Secundo, pas plus que l’OLP-Fatah, ni l’Egypte ni la Jordanie n’aurait le moindre intérêt à protéger Israël des terroristes palestiniens.

Bolton, Inbar et Pipes tiennent pour assuré qu’Israël n’a aucun intérêt à affirmer ou reprendre le contrôle de Gaza ou de la Jédée et de la Samarie. Ceci est raisonnable, compte tenu des positions des gouvernements récents sur ce sujet. Cependant, la question n’est pas tant qu’Israël est ou n’est pas intéressé à conserver le contrôle sur ces territoires – que la plupart des Israéliens ne sont pas non plus intéressés à lâcher le contrôle de Judée et de Samarie à la lumière de ce qui est arrivé après le retrait de Gaza des forces militaires et des civils d’Israël.

La question saillante, maintenant qu’il est clair que la solution à deux Etats a échoué, c’est : quel est la meilleure option pour gérer le conflit ? Non seulement Israël serait bien incapable de croire que sa situation sécuritaire aille en s’améliorant si ces zones étaient restituées au contrôle jordanien et égyptien, mais Israël pourrait être certaine que sa situation sécuritaire se détériore rapidement au fur et à mesure que les préparatifs pour une guerre régionale augmenteraient dangereusement. Avec une rétrocession de Gaza, de la Judée et de la Samarie sous tutelle égyptienne et jordanienne, Israël se retrouverait prise entre des frontières indéfendables et le devoir de faire face à la perspective d’une déstabilisation des régimes égyptien et jordanien.

Actuellement, Israël a la possibilité d’entrer à Gaza, sans se préoccuper du fait que cela pourrait bien provoquer une guerre avec l’Egypte. Il a minimisé la menace terroriste en provenance de Judée et Samarie par le contrôle des zones et grâce à l’aide massive de la forte présence civile israélienne dans ces secteurs qui renforce le contrôle sur les routes et les collines. Les forces de défense israéliennes peuvent opérer librement à l’intérieur de ces territoires sans risquer une guerre avec la Jordanie. Tsahal contrôle le long de frontière avec la Jordanie et a la capacité d’empêcher les infiltrations terroristes depuis l’Est.

Si la situation actuelle est préférable à la “solution à trois Etats”, et si la situation présente elle-même est intenable, la même question surgit à nouveau : que doit-on faire ? Quel nouveau paradigme politique devrait remplacer la solution pour deux Etats mise en échec ?

La meilleure façon d’avancer consiste à rejeter les appels à trouver absolument une solution et de se concentrer exclusivement sur une stabilisation. Avec la continuation des tirs de roquettes et de mortiers lancés depuis Gaza en dépit de l’opération « Plomb Durci » et avec le refus de la Communauté Internationale de renforcer les résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU interdisant à l’Iran d’exporter des armes, il est clair que Gaza restera une zone sponsorisée par l’Iran et contrôlée par le Hamas aussi longtemps que le Hamas gardera le contrôle de la frontière internationale avec l’Egypte.

Aussi Israël doit-il reprendre le contrôle de la frontière.

Il est tout aussi clair que le Hamas et ses associés terroristes au sein du Fatah et du Djihad Islamique continueront de prendre pour cible le Sud aussi longtemps qu’ils le pourront. Aussi Israël a t-il besoin d’établir une zone de sécurité à l’intérieur de Gaza pour protéger le Sud du rayon d’extension des roquettes et obus de mortiers.

D’un point de vue économique, il est évident que sur le long terme, la seule perspective de développement pour Gaza réside dans une sorte d’union économique avec le nord du Sinaï largement dépeuplé. Depuis des années, l’Egypte a rejeté les appels pour une intégration économique de Gaza. Des pressions devraient être exercées sur le Caire pour qu’il revoit sa position à mesure qu’Israël stabilise la situation sécuritaire dans Gaza-même.

Comme en Judée et Samarie, Israël devrait continuer à exercer son contrôle militaire sur les territoires avec pour objectif de consolider sa sécurité nationale. Il devrait aussi imposer ses règles aux territoires qui appartiennent au cadre du consensus interne. Ces zones comprennent les blocs d’implantation d’Etzion, Maalé Adumim, Adam, Ofra et Ariel, ainsi que la vallée du Jourdain.

Israël devrait mettre un terme à son soutien à l’AP dirigée par l’OLP-Fatah, et soutenir le renforcement d’éléments non-djihadistes au sein de la société palestinienne, afin qu’ils prennent la tête d’une nouvelle autorité autonome dans les territoires. Ces nouveaux dirigeants, qui peuvent être les leaders traditionnels des clans locaux, devraient même être encouragés à intégrer Israël ou à chercher une confédération civile avec la Jordanie. La Jordanie pourrait prendre un rôle accru dans les affaires civiles des Palestiniens en Judée et Samarie, en réinstituant, par exemple, leur citoyenneté jordanienne qu’elle a illégalement révoquée en 1988. Au même moment, Israël pourrait mettre fin à son gel des constructions pour les communautés israéliennes dans les territoires.

Il est aujourd’hui manifeste que, pour se développer au sein d’une société qui serait capable de se constituer en Etat à long terme, les Palestiniens requièrent une période d’une à deux générations pour reconstruire leur société selon une voie pacifique. Ils ne réaliseront pas cela dans des environnements où les terroristes se sont alignés sur des régimes impopulaires et répressifs.

L’option selon laquelle il faut poursuivre et renforcer le contrôle israélien est loin d’être attractive pour beaucoup. Mais c’est la seule option qui fournira un environnement conduisant à une telle réorganisation sur le long terme de la société palestinienne, qui sauvegardera également la propre sécurité et le bien-être national d’Israël.

A l’heure où il est devenu vital de reconnaître que la solution à deux Etats mise en échec doit être abandonnée, il est tout aussi important de ne pas la remplacer par un autre proposition elle-même promise à l’échec. La meilleure façon d’avancer consiste à adopter une politique de stabilisation permettant à Israël d’assurer sa propre sécurité tout en fournissant aux Palestiniens une opportunité d’intégrer graduellement et pacifiquement l’environnement de leurs voisins israéliens, égyptiens et jordaniens.